Depuis la décision de l’APAJH de ne pas acheter le FAM, beaucoup de bruits circulent, on parle de déficit, de saisine, de mise sous tutelle et de budget en déséquilibre qu’en est -il vraiment ?
Je crois qu’il est important de faire un peu de pédagogie en effet. La situation étant inédite pour une communauté de communes.
Reprenons donc si vous le voulez bien. Le 25 novembre dernier, le rapport de la Direction Régionale des Finances Publiques (dit rapport « Geoffroy ») a tracé trois pistes à suivre, ce que nous nous sommes appliqués à faire, non sans mal, mais enfin il le fallait.
1 . D’abord réaliser 900 000€ d’économie pour équilibrer un Budget Primitif en année zéro :
– Baisser les dépenses de fonctionnement de tous les services et je peux vous dire que les chefs de service ont été mis à rude épreuve car il s’agit de faire encore, avec encore moins !
– Mais aussi revoir la « solidarité » entre les communes et la communauté de communes. Nous avons donc travaillé ardemment lors des réunions de la commission finance depuis février et nous avons donc réuni la CLECT (Commission locale d’évaluation des charges transférées) en mars. En décembre 2014, l’empilement des compétences dû à la fusion n’avait pas été accompagné de transfert de moyens suffisants en faveur de la communauté de communes. La CLECT de mars a adopté un principe de baisse de ces attributions pour les 26 communes, et le conseil l’a validé en mars également.
2 . Solliciter une avance de l’Etat : Nous avons rencontré M. Christian Eckert, Secrétaire d’Etat du budget et des comptes publiques, le 4 avril dernier : il nous a accordé une avance de trésorerie de 2,3 millions d’€, ce qui nous a permis de régler 60 % de nos dettes auprès des entreprises, presque toutes les factures 2016. Mais attention, c’est une avance sur recettes, il ne s’agit pas de tout dépenser en mois au risque de ne plus pouvoir payer les agents le mois d’après.
3 . Mener une réflexion sur les compétences exercées par la Communauté de communes. La commission des statuts a fait plusieurs propositions, mais a surtout retenu que l’échelle intercommunale avait un sens pour les compétences que les communes nous avaient déjà transférées, et qu’on ne pouvait pas avoir simplement une logique comptable : on parle de services rendus à la population et d’attractivité du territoire. Nous avons tenté d’étayer une réflexion lors des réunions de la commission des statuts. Je tiens d’ailleurs à préciser que si la presse locale à beaucoup focalisé le débat autour de la compétence Enfance-Jeunesse il n’a pourtant jamais été question d’abandonner les alsh et la crèche. Pour autant, je considère que le travail devrait pouvoir se poursuivre. Il faut du temps vous savez, tout le monde ne va pas au même rythme, c’est un exercice très compliqué que l’on nous demande de faire.
En fait, désormais, c’est à la Cour des Comptes de donner des préconisations et puis vous, bon an mal an, vous les suivez ?
Oui, alors là aussi, à celles et ceux qui semblent appeler de leur voeux la mise sous tutelle, j’aimerais quand même rappeler qu’il y a une belle différence entre les deux options. Garder la main sur le plan de redressement c’est atténuer la sévérité du redressement, c’est garder la main sur ce que nous voulons pour demain en construisant un vrai projet de territoire et éviter l’hémorragie des populations. Avec la mise sous tutelle ce serait étrangler les communes, assommer le contribuable !
Je veux que vous compreniez que le nouvel exécutif de la communauté travail en conscience et en responsabilités. Nous sommes unis dans un même souci de faire « au moins pire » pour ce territoire qui est notre ADN. C’est une charge exigeante et moralement très lourde à porter. Nous travaillons donc d’arrache-pied.
Nous avons fait des choix douloureux. Nous avons fait le choix de :
– baisser les subventions aux associations à qui nous déléguons des services comme TomPousse, Clé de Contact ou encore l’EPIC (Office du Tourisme d’Aubusson Felletin) ;
de vendre des actifs comme le FAM mais encore d’autres bâtiments, du matériel ;
– remettre à plat et entièrement remodeler notre système de fonctionnement. Par exemple : mise en place de la comptabilité d’engagement, suivi de la consommation budgétaire par service ;
– engager une démarche d’évaluation de la Qualité de Vie au Travail pour nos agents. Une crise d’une telle ampleur n’est pas sans conséquences pour les agents qui travaillent au quotidien sur le terrain. Les agents de la collectivité sont notre richesse et ils sont en souffrance. Les résultats de l’enquête vont bientôt nous parvenir et ce sera l’occasion de tous nous réunir ;
– éditer un bulletin de communication interne totalement indépendant de l’exécutif « Contact » qui permet de créer du lien, de s’informer, de s’exprimer ;
– créer un CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) ;
– animer le dialogue démocratique et associer plus régulièrement les citoyens au processus décisionnel avec la mise en place de dispositifs de participation citoyenne. Un conseil de développement se met actuellement en place au sein de notre collectivité et nous ne pouvons que nous en féliciter ;
– payer 60% de nos dettes.
Revenons, si vous le voulez bien, sur les causes du déficit, quel est son montant exact ?
Le montant exact est de 4 M d’euros. Les causes ont clairement été établies :
– insuffisance des transferts de moyens à la comcom en 2014 ;
– déséquilibre entre le niveau d’emprunt et les capacités de remboursement ;
– utilisation de l’argent des emprunts pour le fonctionnement ;
– sans oublier la ligne de trésorerie frauduleuse pour laquelle j’ai porté plainte et qui a permis de « gagner » un an mais pendant lequel le déficit a continué à se creuser.
Alors la vente du FAM c’est fini ? Que s’est -il passé ?
Non ce n’est pas « fini » mais disons qu’il aurait été beaucoup plus simple de le vendre directement à notre locataire, en l’occurrence l’APAJH. Nous ne baissons pas les bras et nous cherchons d’autres repreneurs.
Par ailleurs, pour ce qui est du prix, je tiens à rappeler que nous nous basons sur l’estimation de France Domaine (Actuelle Direction de l’immobilier de l’État principalement chargée de superviser la gestion du patrimoine immobilier de l’État mis à la disposition des ministères et des établissements publics nationaux) et que la marge d’augmentation ou de diminution du prix autorisée est de 20%. Lors de la réunion de la semaine dernière, des représentants de France Domaine étaient présents. J’en profite pour rappeler au passage que la comcom du Plateau d’abord puis CGS ensuite s’étaient engagées à ne pas augmenter le loyer malgré la mise en service de la nouvelle extension (1.7M d’emprunt). La comcom a toujours respecté scrupuleusement les conventions signées et ses obligations de travaux en tant que bon propriétaire.
La Communauté de communes a investi 9,3 millions d’€ depuis la création du FAM, les loyers et la récupération de TVA ont contribué à hauteur de 9,1 millions à l’équilibre de cette opération. La Communauté de communes n’a pas fait de bénéfices.
Que conditionne vraiment cette vente du FAM ? On a l’impression que sans cette vente c’est la tutelle assurée !
La vente du FAM constituerait des recettes d’investissement qui sont inscrites au Budget Principal 2017 comme nous a autorisé à le faire M. Eckert, lors de la réunion du 4 avril à Bercy. Le budget est donc en déséquilibre d’où la saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet. Mais la saisine n’est pas la tutelle contrairement à ce que l’on peut entendre ici ou là.
Bon alors la « saisine » c’est quoi exactement ? Quel est son processus ?
Son processus est clair, maintenant que la CRC est saisie elle a un mois pour émettre ses préconisations. Le Conseil communautaire se prononcera alors, dans un délai d’un mois là encore, sur ces préconisations. Si nous les acceptons toutes, ou que les amendements que nous leur apporterons conviennent au Préfet, nous resterons en réseau d’alerte. En revanche si le Conseil communautaire rejette les préconisations ou que nos amendements ne sont pas validés par le Préfet nous passerons sous « contrôle ».
Vous restez confiant ?
La vente du FAM est encore possible. La mise sous tutelle signifierait une forte augmentation des impôts. Ce n’est pas concevable car nos contribuables sont peu aisés et cela me choquerait d’un point de vue moral. Ce n’est pas au contribuable de payer les erreurs de gestion passées.
Et puis je ne crois pas que l’État puisse décider en conscience d’abandonner notre territoire, je retournerai à Bercy.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Oui, j’aimerais ajouter que les Vice-présidents font preuve d’une belle unité dans l’épreuve que nous traversons et je les en remercie, chacun, sincèrement, chaleureusement.
Entretien réalisé le lundi 29 mars 2017